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Les troubles de l’oralité alimentaire, les difficultés alimentaires des enfants CHARGE
Pourquoi les difficultés alimentaires des enfants « CHARGE » sont-elles si fréquentes ? Que faire ?
dimanche 17 août 2014, par
Ce texte est extrait du recueil des actes des Journées CHARGE 2014, disponible en téléchargement.
Développement de l’oralité alimentaire
L’oralité primaire est faite de succion, de succion/déglutition/ventilation et de cri, de vocalise.
L’oralité secondaire est faite d’alimentation à la cuillère, de mastication/respiration et de langage.
Facteurs impliqués dans le comportement alimentaire
Les outils de l’oralité primaire se mettent en place chez l’embryon
L’architecture morphogénétique passe par l’architecture faciale à partir du SNC, les gènes du développement et les organes de l’alimentation. Dans le cas du syndrome CHARGE, les sujets présentent des troubles du développement du tronc cérébral et des nerfs crâniens responsables de la sensori-motricité du pharynx, larynx, oesophage et de la coordination succion/déglutition.
Les sens foetaux : T.O.G.A.V.
• Touché
• Olfaction
• Gustation
• Audition
• Vision
Olfaction foetale
La placode olfactive se développe à la 4ème semaine de vie embryonnaire.
A la 5ème semaine, la cupule olfactive se détache du prosencéphale pour migrer dans les bourgeons nasaux.
En 7ème semaine, le bulbe olfactif est individualisé (on parle ici des cellules à gonadotrophines et des cellules du tractus olfactif).
Durand le second trimestre, le foetus développe la rhinencéphale, l’hypothalamus et le système limbique.
Vient ensuite le développement du système trijéminé et de l’organe voméronasal de Jacobson.
- Université Médicale Virtuelle Francophone (UMVF)
En cas de syndrome CHARGE, une anomalie de ces tissus est constatée.
Gustation
La gustation se fait grâce aux bourgeons situés sur la langue.
Ils se développent entre la 7ème et la 15ème semaine.
On parle ici de transmission par le trijumeau et la racine sensitive du facial.
Cette notion de gustation inclut la distinction des 4 goûts primaires : sucré, salé, acide, amer.
Quand on évoque le goût, il s’agit en réalité de 20% de gustation et de 80% d’olfaction.
A ce niveau, il n’existe pas d’anomalie dans le syndrome CHARGE.
Rôles de l’oralité foetale ?
Lors de l’oralité foetale, on assiste au développement et à la mise en fonction de l’olfaction et la gustation.
C’est une préparation à la vie extra-utérine. Les foetus font des expérimentations sensorimotrices +++ et sensorielles.
Est-ce inné ou acquis ? Ils ne naissent pas égaux.
A la naissance, tout est prêt sauf la ventilation ?
Est altérée chez les bébés CHARGE la coordination succion/déglutition/ventilation.
La tétée
La tétée est une succession de stimuli organisés, répétés, intégrés. Ces stimuli
sont l’audition, la vision, le vestibule, l’olfaction, le contact et la proprioception. Le bébé se trouve dans une phase d’intégration multisensorielle.
C’est l’expérience d’une continuité.
La cohérence, l’homéostasie et la bientraitance sont toujours présentes.
On assiste à la construction corporelle, l’émergence de la pensée, mais aussi à la construction de la fonction maternelle.
Privation de cette « construction » chez certains bébés CHARGE
Dans le cas où l’enfant n’a pas cette construction, il faut alors respecter les incapacités, éviter les stress pour l’enfant.
On devra favoriser le lien, le peau à peau, donner un sens aux temps de nutrition
entérale, stimuler la gustation et respecter les rythmes afin de préserver l’oralité.
Traiter
Il est important de traiter la douleur, les bronchites et le RGO (reflux gastro-oesaphagien).
Il faut également éviter les fausses routes. Le bébé sera bien nourri pour gagner des cm et il faudra penser à faire des réserves pour le sevrage. On va attendre dans les meilleures conditions possibles l’amélioration spontanée de la coordination pharyngo-laryngée puisque le réflexe de déglutition ne se rééduque pas.
Cependant, une chirurgie anti-reflux et gastrostomie se fait si le problème perdure
au-delà de 6 mois.
Éviter l’apparition de l’hypersensibilité orale
C’est le rôle de la psychomotricienne ou du kinésithérapeute, les paramédicaux.
La Prévention
Un jour, le pharynx s’éclaircit grâce aux facteurs impliqués dans le comportement alimentaire
Parallélisme avec le développement psychomoteur
A 6 mois le bébé acquiert une préhension bimanuelle, une tenue axiale.
A 9 mois, c’est le déplacement, l’échange, le jette-ramasse. Il s’agit de l’organisation, de la structuration de la « cartographie » sensori-motrice endo-buccale.
On parle d’expérimentation autonome, volontaire de la cartographie endobuccale. C’est une phase « sensible » du développement.
L’oralité secondaire est faite d’interactions.
Apprendre à manger, c’est compliqué
La zone orale est fragile, la déglutition est encore hasardeuse. L’enfant estime qu’on le force à faire quelque chose, que ses parents sont stressés avec ça.
Les « Mange ta soupe, tu grandiras » ne sont plus efficaces et l’enfant ne perçoit pas le goût.
Il est rapidement stoppé par de petits détails comme l’absence d’un aliment qu’il apprécie.
Alors, il devient important sur les goûts marqués, qui amusent en laissant l’enfant être acteur.
Quand on est grand et très coincé
Il faut savoir si la déglutition est possible.
On passe par l’eau, on repart des fondamentaux.
On va désensibiliser avec des massages, de la relaxation, du contact, de la gustation, en allant du plus global au plus spécifique.
Il est impératif de faire confiance, d’oser.
Patience, ça va venir !
Enfin, offrir de l’autonomie, respecter les goûts et les textures.
A 3 ans, manger sa soupe ne fait plus beaucoup grandir !
On va donc éviter les TCA (troubles des comportements alimentaires) et les posttraumatiques.
Pr. Véronique Abadie
Pédiatrie Générale, Hôpital Necker Enfants Malades - Faculté Paris Descartes